Apologie de la panne mécanique
Posté : 17 sept. 2013 20:03
Vous hésitez encore à voyager en camion ? Vous n'arrivez pas à vous décider, ou à décider votre conjoint(e) des innombrables avantages à partir sur les routes avec un véhicule de plusieurs tonnes ?
J'ai testé pour vous l'argument choc : la merveilleuse possibilité de tomber en panne ! Véritable catastrophe pour le touriste pressé, la casse mécanique est sans doute une des plus belles opportunités qui s'offrent au voyageur lorsqu'il décide de partir à la découverte du vaste monde derrière un volant. Mais attention, pour cela il faut y mettre du sien : la réussite de la panne dépend en partie du lieu où elle se produit, mais surtout de son ampleur. Oubliez la petite panne mesquine qui vous immobilise 2 ou 3 jours, elle ne vous laissera comme souvenir que celui d'une vilaine épine dans le pied (ou dans le pneu, c'est selon).
Non, quand vous cassez, voyez grand ! Cassez avec largesse, avec munificence, cassez magnanime ! Faites fi de la crevaison, méprisez le coup du filtre encrassé ou de la durite bouchée, riez vous d'un embrayage qui fume ou d'un radiateur percé !
N'écoutez que votre courage et allez-y franchement : flinguez votre moteur, détruisez votre transmission, perdez un essieu s'il le faut mais mettez-y du coeur, mettez dans votre panne le meilleur de vous-même, elle vous le rendra bien.
Si vous avez respecté les deux conditions de la panne réussie (à savoir le lieu et l'importance), à vous les félicités de la galère. Vous avez maintenant la possibilité de découvrir en profondeur le lieu dans lequel votre véhicule a rendu l'âme. Alors qu'avec un camion en bonne santé vous n'auriez fait qu'effleurer cet endroit, vous bénéficiez maintenant de tout le temps nécessaire (et même plus) pour en saisir tous les aspects, en découvrir les charmes subtils et les facettes qui pour briller ont besoin de l'éclairage bien particulier d'un moment qu'il faut pouvoir avoir le luxe d'attendre.
Vous en rencontrerez les habitants, y prendrez des habitudes, y reconnaîtrez des visages déjà croisés et vous ferez aborder avec un sourire par des inconnus pour qui vous ne l'êtes plus tout à fait : "bonjour, c'est bien vous le français en carafe ?". La belle panne mécanique confère à son auteur une certaine notoriété, lui offre le privilège d'être de toutes les petites discussions anodines, le sujet abordé au café avec le voisin de table ou chez le marchand de journaux en achetant son quotidien préféré.
Et c'est là que vous commencerez à y rencontrer des gens biens, à vous faire indiquer les bonnes adresses, les petits lieux anodins au charme discret, celui par exemple où le coucher de soleil est le plus beau, ou encore celui où il fait bon se réfugier quand le froid devient mordant ou la chaleur suffocante. Voilà pour ce qui est du lieu de la panne, et du temps nécessaire à la résoudre.
Pour ce qui est de l'ampleur des dégâts, c'est peut-être là le plus important. En effet il va de soi qu'un gros problème technique aura très peu de chance de trouver un dénouement local, et la recherche de solutions va vous amener à élargir considérablement les options à envisager, et de là les gens à contacter. C'est là que se manifeste toute la félicité procurée par cette immobilisation forcée : le bonheur de voir un mouvement de solidarité et d'énergies se lancer dans le seul but de vous aider. Le ton que j'emploie est peut-être léger afin de dédramatiser la situation, mais tous ces témoignages de sympathie et d'aide rendraient confiance en l'espèce humaine au dernier des misanthropes.
Si vous en êtes à penser "monde de merde, peuplé de cons", c'est qu'il est grand temps pour vous de tomber en panne ! Je mets au défi le plus aigri de mes congénères de ne pas être touché par le coup de main volontairement proposé par une personne qu'on n'aura rencontré qu'une fois (voire jamais) dont la seule intention est de vous permettre de faire rouler à nouveau votre monture, et par la même vous sortir d'une situation qu'il sait être pénible pour vous.
En effet c'est fou comme dans la vie quotidienne les imbéciles, mesquins et malveillants de tout bord ont tendance à se manifester à tout propos. Alors que les altruistes, les bons et les désintéressés ont besoin de ce petit coup de pouce pour se révéler à nos yeux tels qu'ils sont : bienveillants.
Le moment de vous remercier de votre aide technique et votre soutien moral, vous tous qui m'en avez apporté ces dernières semaines, ne devrait plus tarder à venir maintenant; mais un poil superstitieux, j'attends le dénouement final pour vous faire part de toute ma reconnaissance.
Par contre celui de vous remercier pour tout ce que cela m'a apporté, surtout à moi qui ai tendance à voir plus facilement le mal que le bien chez mes semblables, est largement venu.
A tous, toute ma gratitude et mes remerciements pour cette panne plus que réussie, j'en serais presque à me languir de la prochaine !
J'ai testé pour vous l'argument choc : la merveilleuse possibilité de tomber en panne ! Véritable catastrophe pour le touriste pressé, la casse mécanique est sans doute une des plus belles opportunités qui s'offrent au voyageur lorsqu'il décide de partir à la découverte du vaste monde derrière un volant. Mais attention, pour cela il faut y mettre du sien : la réussite de la panne dépend en partie du lieu où elle se produit, mais surtout de son ampleur. Oubliez la petite panne mesquine qui vous immobilise 2 ou 3 jours, elle ne vous laissera comme souvenir que celui d'une vilaine épine dans le pied (ou dans le pneu, c'est selon).
Non, quand vous cassez, voyez grand ! Cassez avec largesse, avec munificence, cassez magnanime ! Faites fi de la crevaison, méprisez le coup du filtre encrassé ou de la durite bouchée, riez vous d'un embrayage qui fume ou d'un radiateur percé !
N'écoutez que votre courage et allez-y franchement : flinguez votre moteur, détruisez votre transmission, perdez un essieu s'il le faut mais mettez-y du coeur, mettez dans votre panne le meilleur de vous-même, elle vous le rendra bien.
Si vous avez respecté les deux conditions de la panne réussie (à savoir le lieu et l'importance), à vous les félicités de la galère. Vous avez maintenant la possibilité de découvrir en profondeur le lieu dans lequel votre véhicule a rendu l'âme. Alors qu'avec un camion en bonne santé vous n'auriez fait qu'effleurer cet endroit, vous bénéficiez maintenant de tout le temps nécessaire (et même plus) pour en saisir tous les aspects, en découvrir les charmes subtils et les facettes qui pour briller ont besoin de l'éclairage bien particulier d'un moment qu'il faut pouvoir avoir le luxe d'attendre.
Vous en rencontrerez les habitants, y prendrez des habitudes, y reconnaîtrez des visages déjà croisés et vous ferez aborder avec un sourire par des inconnus pour qui vous ne l'êtes plus tout à fait : "bonjour, c'est bien vous le français en carafe ?". La belle panne mécanique confère à son auteur une certaine notoriété, lui offre le privilège d'être de toutes les petites discussions anodines, le sujet abordé au café avec le voisin de table ou chez le marchand de journaux en achetant son quotidien préféré.
Et c'est là que vous commencerez à y rencontrer des gens biens, à vous faire indiquer les bonnes adresses, les petits lieux anodins au charme discret, celui par exemple où le coucher de soleil est le plus beau, ou encore celui où il fait bon se réfugier quand le froid devient mordant ou la chaleur suffocante. Voilà pour ce qui est du lieu de la panne, et du temps nécessaire à la résoudre.
Pour ce qui est de l'ampleur des dégâts, c'est peut-être là le plus important. En effet il va de soi qu'un gros problème technique aura très peu de chance de trouver un dénouement local, et la recherche de solutions va vous amener à élargir considérablement les options à envisager, et de là les gens à contacter. C'est là que se manifeste toute la félicité procurée par cette immobilisation forcée : le bonheur de voir un mouvement de solidarité et d'énergies se lancer dans le seul but de vous aider. Le ton que j'emploie est peut-être léger afin de dédramatiser la situation, mais tous ces témoignages de sympathie et d'aide rendraient confiance en l'espèce humaine au dernier des misanthropes.
Si vous en êtes à penser "monde de merde, peuplé de cons", c'est qu'il est grand temps pour vous de tomber en panne ! Je mets au défi le plus aigri de mes congénères de ne pas être touché par le coup de main volontairement proposé par une personne qu'on n'aura rencontré qu'une fois (voire jamais) dont la seule intention est de vous permettre de faire rouler à nouveau votre monture, et par la même vous sortir d'une situation qu'il sait être pénible pour vous.
En effet c'est fou comme dans la vie quotidienne les imbéciles, mesquins et malveillants de tout bord ont tendance à se manifester à tout propos. Alors que les altruistes, les bons et les désintéressés ont besoin de ce petit coup de pouce pour se révéler à nos yeux tels qu'ils sont : bienveillants.
Le moment de vous remercier de votre aide technique et votre soutien moral, vous tous qui m'en avez apporté ces dernières semaines, ne devrait plus tarder à venir maintenant; mais un poil superstitieux, j'attends le dénouement final pour vous faire part de toute ma reconnaissance.
Par contre celui de vous remercier pour tout ce que cela m'a apporté, surtout à moi qui ai tendance à voir plus facilement le mal que le bien chez mes semblables, est largement venu.
A tous, toute ma gratitude et mes remerciements pour cette panne plus que réussie, j'en serais presque à me languir de la prochaine !
